La réponse se trouve dans le cerveau des enfants, dans les connexions neuronales, aussi appelées synapses. À la naissance, les synapses des nouveau-nés ne sont pas au complet: seuls 10% des connexions neuronales sont achevés. Les 90% restants se font et se défont tout au long de la vie, mais la majorité se réalisent jusqu’au passage à l’âge adulte. L’essentiel de la formation du cerveau se fait donc pendant l’enfance. 

Chaque cerveau va se façonner suivant les activités exercées par l’individu (foot, danse, lecture, musique, chant…). Or les enfants baignent dans un univers différencié en termes sexués. C'est pour cela que si une femme et un homme, très sportifs, pratiquent le même sport, et qu’une femme et un homme, musiciens professionnels, jouent du même instrument, il y aura davantage de similitudes entre les deux musiciens ou entre les deux sportifs qu’entre les deux hommes ou les deux femmes.

Dans le même ordre d’idée, les garçons, parce qu’ils ont eu plus l’occasion de jouer aux Lego ou au Meccano, sont effectivement meilleurs en géométrie que les filles. Le fait d’emboîter des briques de Lego ou d’assembler des pièces en les vissant permet d’acquérir une meilleure spatialisation et localisation dans l’espace et donc de développer des connexions neuronales liées à la notion de l’espace en 3D.

Jouer au football, un sport-institution par lequel quasiment tous les petits garçons passent, permet aussi de stimuler et de fortifier cette bonne vision de l’espace: au foot, l’enfant doit en effet voir où se trouvent ses adversaires et ses coéquipiers sur la totalité du terrain pour pouvoir passer le ballon à un joueur de son équipe; il doit aussi bien connaître sa droite de sa gauche pour envoyer la balle dans la bonne direction quand il est bloqué par l’équipe adverse et qu’un coéquipier lui crie «à droite» ou «derrière». Il en va de même des autres jeux de ballon, comme le ballon prisonnier, jeux auxquels ils s’adonnent dans la cour de récréation ou au square après l’école bien plus que les filles.

Ainsi, quand on s’écrie que les femmes ne sont pas fichues de lire une carte routière, cela va plus loin que le simple stéréotype. Lors de recherches sur les aptitudes spatiales, il a été constaté qu’à l’âge adulte les femmes étaient moins capables que les hommes de placer une barre à l’horizontale ou à la verticale sans s’aider d’indices du monde extérieur, comme des murs, des chambranles de porte ou des fenêtres. De même, lorsque l’on demande à des adultes de visualiser dans leur tête la rotation de x degrés d’un objet posé sur une table puis qu’on leur propose plusieurs photos de cet objet plus ou moins tourné et qu’on leur demande laquelle correspond à la situation imaginée, les hommes parviennent davantage à identifier la bonne illustration.

Ces différences de compétences entre hommes et femmes ne sont pas innées. Le fait que les hommes sachent mieux se repérer dans l’espace s’explique par la socialisation différenciée et non la génétique, et notamment par les jeux et sports proposés aux enfants selon leur sexe, qui, en raison de la plasticité du cerveau, vont modeler des cerveaux différents et des aptitudes différenciées. Certes, il existe des différences selon le sexe dans les tout premiers mois de la vie entre les nouveau-nés, mais elles se rapportent à l’émotivité et aux capacités langagières et n’ont rien à voir avec la spatialisation.

L’origine de ces différences ne se trouve pas non plus dans les hormones dans lesquelles ont baigné les fœtus pendant la grossesse. Ainsi, les individus avec des chromosomes XX mais un appareil génital soit partiellement soit totalement masculin en raison d’hyperplasie congénitale des surrénales présentent un degré d’activité plus élevé en moyenne que les autres filles mais aucunement une supériorité en termes d’aptitudes spatiales.