C’est faux. Cela fait appel à des idées reçues et des représentations erronées sur les métiers. Certes, il est vrai qu’à l’âge adulte les femmes ont une force physique moindre et que les hommes ont une masse musculaire plus importante qu’elles. Mais, traditionnellement, les métiers où l’on est amené à porter des charges lourdes ne sont pas pour autant réservés à la gent masculine.

Il ne s’agit pas de dire que les métiers de la construction sont physiquement faciles, mais que la pénibilité et le fait de porter des charges lourdes ne sont pas réservés aux métiers masculins. Il existe de nombreuses professions qui amènent à faire un effort physique mais pour lesquelles on ne pense pas une seule seconde qu’une musculature développée est une condition sine qua non.

Prenons par exemple le cas de la profession d’aide-soignant, qui est très féminisée. Les aides-soignantes doivent, sans l’aide de moyens mécaniques, porter, soulever des corps, les faire passer d’un brancard à un lit, alors que les personnes sont inconscientes ou ne sont pas en état de les aider. Il en va de même des caissières: les packs de briques de lait ou de bouteilles d’eau, c’est lourd! Et ces portages, même de charges plus légères, ont lieu en continu dans la journée, au rythme du tapis de caisse. Autre exemple: on oublie à quel point un enfant peut être lourd et on ne se dit pas que travailler dans le secteur de la petite enfance signifie aussi être amené à porter des enfants.

Cette scission des activités professionnelles selon le sexe ne répond donc pas à des arguments biologiques, comme la différence de force physique entre hommes et femmes. Elle suit davantage un fossé culturel sexué entre le domaine privé et le domaine public, qui reproduit quasi à l’identique la différenciation des jouets pour enfants et des professions qu’ils évoquent.

Dans les rayons pour filles des magasins de jouets ou les pages roses des catalogues de jouets, la coiffure, la couture ou la cuisine occupent une place de choix. Cela signifie indirectement que ces activités sont identifiées comme féminines. Or, à l’âge adulte, les professionnels reconnus dans ces trois domaines, qu’ils s’agissent donc de chefs cuisiniers, de couturiers et stylistes ou de coiffeurs, sont majoritairement des hommes.

Ce décalage entre le monde de l’enfance et le monde de l’adulte n’est pas si paradoxal. Puisque c’est bien une majorité de jeunes filles qui se dirigent en majorité vers l’apprentissage de la coiffure ou du stylisme. Le décalage est en fait de l’ordre du privé et du public: les femmes sont celles qui cuisinent à la maison (activité socialement peu valorisée), les hommes sont ceux qui deviennent des chefs reconnus (activité supra-valorisée). Ainsi, quand un adolescent de sexe masculin veut devenir styliste, il se projette dans une autre dimension sociale que les filles du même âge. Son objectif, c’est de devenir grand couturier.

En résumé, la sexuation des professions, plutôt que de suivre des rails biologiques, respecte une division privé-public, faible prestige social-haut prestige social, les femmes étant associées à des activités du domaine privé de faible valeur, tandis que les hommes exercent davantage un métier public à fort prestige social.